Salomon vs. Bouddha : quatre clés pour annoncer l’Évangile aux bouddhistes

 

Article d’Alex Kocman, missionnaire avec l’ABWE, initialement publié le 20 décembre 2018 sur le blog de l’ABWE. Traduction : Alex Lopez.

**

 

Commençons à contextualiser l’Évangile en partant d’un terrain commun avec le problème de la souffrance.

Dans le domaine de la mission, la contextualisation est en quelque sorte « l’art et la manière » de transposer les vérités intemporelles et transcendantes de l’Évangile dans une forme culturellement pertinente et compréhensible.

La contextualisation dépend de la quantité de terrain commun disponible entre la vision non chrétienne du monde et les catégories bibliques. Communiquer l’Évangile dans un contexte oriental est particulièrement difficile. Peu d’enseignements bibliques, voire aucun, peuvent être facilement transposés dans le contexte religieux dharmique (ou « yogique », si l’on rependre les catégories d’Irving Hexham, ndlr) – un monde de religions fondées sur la nature cyclique de l’histoire, les forces impersonnelles et l’objectif ultime de la non-existence après la mort. L’hindouisme, le bouddhisme, le jaïnisme, et le shintoïsme ne cessent de déconcerter les missionnaires occidentaux.

Comment pouvons-nous partager l’Évangile avec nos amis bouddhistes sans avoir au moins un ensemble d’hypothèses communes ? Les Quatre nobles vérités offrent aux chrétiens quatre tremplins de communication points de vue de la Bible sur la vie, la mort et le salut.

 

 

Un pont entre la Bible et le Bouddha

Il y a des milliers d’années, un membre de la royauté, riche et aisé, s’est lancé dans une quête de sens ultime. La sagesse qu’il a accumulée l’a finalement conduit à être davantage connu pour sa sagesse que pour sa richesse ou son pouvoir stupéfiant.

Qui était ce roi ? À première vue, on pourrait croire qu’il s’agit de Siddhartha Gautama, alias « le Bouddha » (« l’illuminé »). Mais il s’agit en fait de la description du roi biblique Salomon.

Salomon, qui a précédé Bouddha d’environ 500 ans, a fait des observations dans le livre de l’Ecclésiaste qui ressemblent beaucoup à celles que l’on attribuera plus tard au penseur oriental. Tous deux estimaient que la vie est éphémère et marquée par la souffrance, de sorte que la valeur plénitude et la joie sont inaccessibles. Tous deux ont également enseigné que l’humanité aspire à davantage que ce que la vie temporelle peut offrir. Et comme la sagesse de Salomon s’est répandue dans le monde antique (1 Rois 4:31), on peut imaginer que les enseignements de Salomon aient influencé le Bouddha lui-même.

Bien sûr, Salomon et Bouddha sont parvenus à des conclusions très différentes : l’un recommandait la poursuite de l’extinction totale de soi, tandis que Salomon termine l’Ecclésiaste en recommandant de craindre Dieu et de garder ses commandements (12:13b).

Quelles étaient les « nobles vérités » propres à Salomon, et où mène son chemin ?

 

 

 

1- CETTE VIE EST PLEINE DE SOUFFRANCES

Comme Siddhartha Gautama, Salomon n’a finalement pas laissé sa royauté l’aveugler sur les dures réalités de la vie. Salomon commence l’Ecclésiaste avec un réalisme déconcertant : « Vanité des vanités… tout est vanité » (1:2).

L’Ecclésiaste traite de la recherche d’une valeur durable, exprimée par yitron, le mot hébreu pour « profit ». À sa grande consternation, Salomon remarque que la vie n’était que hevel (« vapeur »), un terme qui signifie la fugacité, la futilité et la vanité de l’existence temporelle.

Le hevel de Salomon recoupe en partie la compréhension de dukkha par Bouddha, qui signifie que la vie est principalement caractérisée par la souffrance. Le travail acharné et la sagesse ne peuvent garantir des résultats parfaits. La vie est aléatoire et marquée par la douleur, et la mort vient nous appeler, laissant finalement tous nos désirs intérieurs inassouvis.

Mais là où Bouddha présente un simple extrait de l’expérience humaine, Salomon voit toute l’ensemble de la pellicule. Salomon sait que la terre était un paradis perdu, comme le décrit l’histoire de Genèse 1-3. La vie terrestre de l’homme était auparavant exempte de souffrance et de futilité parce qu’il existait une communion parfaite avec le Dieu tout-puissant. C’est en cette communion que l’humanité trouvait le « chemin de la vie », « la plénitude de la joie » et « les plaisirs éternels » (Psaume 16:11). Ils n’avaient besoin de rien d’autre (Psaume 23:1). Tout était très bon (Genèse 1:31).

Pourtant, quelques milliers d’années plus tard, Salomon a écrit que « tout est vanité et poursuite du vent », et « qu’il n’y a rien à gagner sous le soleil » (Ecclésiaste 2:11).

Qu’est-ce qui a changé ?

 

 

 

2- LA SOUFFRANCE DE LA VIE DÉCOULE DE NOS DÉSIRS

Le Bouddha attribue la souffrance au désir et appelle cela tanha. Des désirs insatisfaits nous maintiennent dans la roue de la souffrance, en dépit du niveau de confort que l’on pourrait atteindre. Mais le concept de tanha rejette indûment la faute sur le désir lui-même plutôt que sur son objet.

Dans la vision biblique du monde, la souffrance en général – même la souffrance « aléatoire » – est le résultat du péché collectif de l’homme contre Dieu, qui remonte aux premiers humains. L’homme a échangé la vraie satisfaction en Dieu contre un plaisir fugace et égoïste. Malgré l’avertissement de ne pas manger du fruit défendu, ils ont vu que « l’arbre était bon à manger et agréable à la vue, et qu’il était précieux pour ouvrir l’intelligence » (Genèse 3:6). Cela les a privés de la satisfaction en Dieu et a introduit le chaos dans un cosmos par ailleurs parfait. Aujourd’hui, nous vivons sous la corruption qui règne dans le monde à cause du désir du péché (2 Pierre 1:4).

D’un point de vue biblique, cependant, le désir lui-même n’est pas le problème. Salomon note que Dieu a « mis l’éternité dans le cœur de l’homme » (Ecclésiaste 3:11). La création a été entraînée dans la chute lorsque l’homme a choisi des désirs erronés, détachés de Dieu. L’histoire est donc linéaire, et non cyclique, comme le bouddhisme le soutient : quelque chose a changé et a toujours été différent depuis. Elle peut donc être remise en ordre.

La nature « narrative » du christianisme, que le bouddhisme ignore globalement, implique que la souffrance a une cause et une fin réelles et historiques. Et l’Évangile offre non seulement la possibilité de supporter la souffrance, mais également d’éviter la souffrance éternelle.

 

 

 

3- NOUS POUVONS ÊTRE RACHETÉS, MÊME PAR LA SOUFFRANCE

L’oubli du passé prive de sens le présent et l’avenir. Salomon sait que le monde originel et l’humanité avaient été créés parfaits. Bouddha, en revanche, ne dispose d’aucune toile de fond pour analyser le présent. Il ne voit que la condition humaine présente, marquée par la souffrance, le désir, et la mortalité. Avec un ensemble de données aussi limité, la seule solution qu’il peut concevoir est la non-existence.

Mais pour les auteurs bibliques, le désir et la souffrance sont les échos d’un monde meilleur, un monde perdu mais destiné à être retrouvé. Comme Paul l’écrit : « La création a été soumise à la vanité, non pas volontairement, mais à cause de celui qui l’a soumise, dans l’espérance que la création elle-même sera libérée de l’esclavage de la corruption et obtiendra la liberté de la gloire des enfants de Dieu » (Ro8:20-21). Notre monde déchu attend une solution, et cette solution vient de Dieu

L’aseité de Dieu signifie qu’il se suffit de lui-même, qu’il est comblé en lui-même, qu’il n’a ni désir impur ni envie insatiable. Non seulement il possède tout ce dont il a besoin, mais il est tout ce dont il a besoin. Par conséquent, Dieu n’a pas besoin de nous. Mais 1000 ans après Salomon, 500 ans après Bouddha, Dieu a agi de manière scandaleuse : en échangeant son bon karma contre notre mauvais, en imputant sa propre réserve infinie de bon karma à tous ceux qui placent leur confiance en lui.

Au travers d’une forme d’abnégation que nous ne pourrons jamais atteindre, le Fils de Dieu s’est incarné. Jésus, le roi sage dont Salomon n’était qu’un type, – a troqué les plaisirs de la royauté céleste pour entrer dans notre souffrance à cause du péché afin de nous en racheter (Philippiens 2:3-11). Il n’avait pas de mauvais désirs et ne méritait donc pas de subir le châtiment. Mais il a enduré, au nom de son peuple, l’ensemble de la colère de Dieu dans sa mort sur la croix. Jésus a été « rendu parfait par la souffrance » afin de pouvoir plaider notre cause devant Dieu (Hébreux 2:10-18).

Comme il était innocent, Dieu l’a ressuscité d’entre les morts. Il ne mourra plus jamais, il règne en tant que Seigneur de l’univers, et il reviendra pour éliminer le péché et la mort, restaurant ainsi le monde à la perfection.

Le Christ invite l’humanité à se joindre à lui dans cette résurrection ultime et finale, dans la félicité et l’harmonie avec Dieu, avec de nouveaux corps libres des désirs du péché (2 Corinthiens 5:8). La mort de Jésus  anéantit notre ancien moi, faisant de chacun de nous une « nouvelle création » (2 Corinthiens 5:17).

Bien que nous souffrions encore dans cette vie, nous pouvons vivre en Jésus car il vit en nous (Jean 14:19), en apaisant nos désirs de péché dans l’attente de vivre une union profonde et satisfaisante avec Dieu dans l’éternité.

« Celui qui croit en moi, même s’il meurt, vivra, et quiconque vit et croit en moi ne mourra jamais » (Jean 11:25-26).

 

 

4- SUIVRE LE CHEMIN DE JÉSUS MÈNE À LA JOIE ÉTERNELLE

Bouddha enseigne que pour se libérer de la souffrance, il fallait renoncer à tous ses désirs et atteindre le néant, c’est-à-dire l’extinction du moi dans l’état de nirvana.

Le chemin de Jésus implique également le renoncement à soi. Jésus lui-même dit : « Celui d’entre vous qui ne renonce pas à tout ce qu’il a ne peut être mon disciple » (Luc 14:33). Mais il s’agit d’un tout autre type d’abnégation, car la garantie d’une récompense ultime lui est associée.

Jésus dit également : « Celui qui perdra sa vie à cause de moi la retrouvera » (Matthieu 10:39). Jésus a décrit l’économie de Dieu comme un « trésor caché dans un champ, qu’un homme a trouvé et recouvert. Puis, dans sa joie, il va vendre tout ce qu’il a et achète ce champ » (Matthieu 13:44). Le renoncement à soi dans le christianisme est un coût temporaire, alors que la récompense est éternelle.

La réalité du Christ rachète même la douleur la plus insupportable. « Nous souffrons avec lui afin d’être glorifiés avec lui » (Romains 8:17). Il ne s’agit pas d’une promesse inconditionnelle de prospérité psychologique ou émotionnelle. Mais le Christ, sans offrir la facilité ou le confort émotionnel dans la vie présente, rend la vie plus que supportable pour ceux qui le connaissent.

Le chemin le plus noble est de suivre simplement Jésus, de se débarrasser de tout poids et du péché qui nous serre de près et de courir avec persévérance la course qui nous est proposée, en ayant les yeux fixés sur Jésus, le fondateur et celui qui perfectionne notre foi. C’est lui qui, en vue de la joie qui lui était réservée, a enduré la croix en méprisant l’ignominie, et qui est assis à la droite du trône de Dieu (cf. Hébreux 12:1-2).

 

 

CHOISIR LE BON CHEMIN

Nous pouvons convenir avec les bouddhistes que la vie est pleine de souffrances. Les bouddhistes peuvent réagir de deux manières. Ils peuvent essayer d’échapper à tout désir – y compris les bonnes aspirations comme la joie, la justice et le bien-être des autres – mais ils découvriront rapidement que nous n’avons pas les ressources en nous-mêmes pour le faire de manière adéquate. Mais si quelqu’un répond au Christ avec foi, en lui demandant de prendre son mauvais karma et de lui donner sa propre justice, alors la vie prend un nouvelle signification, sachant que « les souffrances du temps présent ne sont pas comparables à la gloire qui nous sera révélée » (Romains 8:18).

 

 

En conclusion, pensez à poser à votre ami ou voisin bouddhiste des questions comme celles-ci :

  • D’après vous, d’où vient la souffrance ?
  • Est-il possible, de manière réaliste, de se débarrasser de tout désir ? Certains désirs – les désirs altruistes, par exemple – ne sont-ils pas intrinsèquement bons ?
  • Que pensez-vous de l’idée d’atteindre la non-existence ? La jouissance éternelle d’un Dieu tout-puissant ne serait-elle pas préférable ?
  • Si Dieu existe, quelle sorte de Dieu pensez-vous qu’il devrait être pour choisir volontairement de souffrir à nos côtés ?
  • Lorsqu’à la fin de la journée, vous ne parvenez pas à assouvir vos désirs de manière adéquate et que vous vous comportez inévitablement de manière imprudente, que se passe-t-il alors ? Comment abordez-vous votre propre culpabilité ? Qu’est-ce qui vous rend si sûr qu’avec suffisamment de cycles de réincarnation, vous finirez par triompher ?
  • Si quelqu’un pouvait d’une manière ou d’une autre transférer tout son karma positif sur votre compte, comme un acte d’amour pur et sans retenue ? Comment réagiriez-vous ?

 

 

 

Le père de Salomon a écrit ces mots dans le psaume 37 : « Fais confiance au Seigneur, et il te donnera les désirs de ton coeur. » L’âme bouddhiste affamée peut être satisfaite éternellement avec Dieu comme principal désir et Jésus comme trésor.

 

Abonnez-vous au Bon Combat

Recevez tous nos nouveaux articles directement sur votre boîte mail ! Garanti sans spam.

Le Bon Combat reçoit régulièrement des contributeurs invités. Retrouvez tous leurs articles en suivant ce compte !