La Guérison Physique : Pour une Pastorale respectueuse de l’espérance chrétienne (Part 3)

Maladie et la tension du “déjà” et du “pas encore”

Au vu de nos dernières conclusions, nous pourrions justement nous demander la raison pour laquelle Dieu a choisi de sauver son peuple de telle sorte que les premiers instants de sa vie nouvelle sont vécus sans être exempté de la souffrance.

Spurgeon a répondu admirablement à cette question :

Pourquoi les maladies et les souffrances sont encore présentes dans le corps du chrétien ? Nos corps sont rachetés, car Christ a racheté notre humanité entière, mais…ce n’est que lors de la résurrection que nous jouirons du résultat complet de la rédemption du corps. La résurrection accomplira pour nos corps ce que la régénération a fait pour nos âmes. Nous sommes nés de nouveau…mais cette œuvre divine fut exercée uniquement sur notre nature spirituelle ; nos corps ne sont pas nés de nouveau : c’est pourquoi ils demeurent toujours sous l’influence de la maladie, de la corruption et de la mort …(…) Encore jusqu’à ce jour le corps est sous la mort à cause du péché, et cela demeure ainsi pour nous rappeler les effets du péché, de sorte que nous puissions sentir en nous-même ce que le péché a fait, et que cela puisse être le meilleur indice de ce qu’aurait fait le péché si nous étions restés sous sa domination, car les souffrances de l’enfer auraient été nôtres pour toujours. Ces souffrances du corps sont voulues …pour nous rappeler que nous devons notre rédemption au Seigneur Jésus, et ainsi que nous demeurions humbles et reconnaissants. Les douleurs et les souffrances sont aussi envoyées pour que nous demeurions sur la voie du ciel, tout comme les épines du nid détournent l’oiseau de sa paresse. Ils nous font languir pour le lieu dans lequel les habitants ne diront plus jamais : je suis malade.

 

Nous allons ainsi examiner les évidences bibliques quant à l’enseignement que la Bible nous délivre sur notre corps avant le retour de Christ. Et c’est bien là que se trouve le talon d’Achille des enseignements qui exigent la guérison pour aujourd’hui.

En 1 Corinthiens 15, Paul nous déclare :

Il y a aussi des corps célestes et des corps terrestres ; mais autre est l’éclat des (corps) célestes, autre celui des (corps) terrestres. Autre est l’éclat du soleil, autre l’éclat de la lune, et autre l’éclat des étoiles ; même une étoile diffère en éclat d’une autre étoile. Ainsi en est-il de la résurrection des morts. Semé corruptible, on ressuscite incorruptible. Semé méprisable, on ressuscite glorieux. Semé plein de faiblesse, on ressuscite plein de force. Semé corps naturel, on ressuscite corps spirituel. S’il y a un corps naturel, il y a aussi un corps spirituel. C’est pourquoi il est écrit : Le premier homme, Adam, devint un être vivant. Le dernier Adam est devenu un esprit vivifiant. Le spirituel n’est pas le premier, c’est ce qui est naturel ; ce qui est spirituel vient ensuite. Le premier homme tiré de la terre est terrestre. Le deuxième homme vient du ciel. Tel est le terrestre, tels sont aussi les terrestres ; et tel est le céleste, tels sont aussi les célestes. Et de même que nous avons porté l’image du terrestre, nous porterons aussi l’image du céleste. (1 Cor 15 :40-49)

Nous voyons clairement que l’apôtre Paul différencie le corps que nous possédons aujourd’hui et celui que nous aurons lors de notre résurrection, au retour de Christ. Il est important de noter deux qualificatifs que l’auteur utilise pour désigner notre corps actuel : corruptible  (phtora) et  faiblesse  (astheneia) sont des termes qui soulignent l’état fragile de notre corps,  un  état de décroissance de ses capacités et croissance de sa fragilité, de sa faiblesse résultant en un épuisement, un croupissement.

Le premier terme souligne  l’expérience de l’homme extérieur dans son processus de mort , et le second  souligne la notion de faiblesse pour l’homme, et le contexte direct dans lequel il est ici utilisé nous permet de comprendre qu’il englobe les faiblesses corporelles, comprenant ainsi les maladies.

La conjugaison de ces deux mots désigne clairement toutes les notions de fragilité du corps humain actuel, y compris la maladie. Au vu de la comparaison que fait l’auteur entre le corps actuel et le futur corps glorieux, il s’en suit que Paul n’entrevoyait pas de vivre la réalisation complète des  bénéfices eschatologiques liés au corps physique avant le retour du Christ.

Au contraire, son insistant contraste entre ce qui corruptible et ce qui est incorruptible, entre les temps présent et les temps eschatologiques (temps où seront consommés totalement toute l’oeuvre accomplie par Jésus-Christ à la croix et dans sa résurrection (résurrection des morts, nouveaux cieux et nouvelle terre)), souligne clairement qu’il possède une vision peu optimiste sur l’évolution naturelle de nos corps avant notre mort. Paul développe ainsi une théologie du corps plutôt pessimiste pour la période dans laquelle nous vivons, la période qui précède le retour du Christ. Pour Lui, le fait de porter  l’image du céleste  et être ainsi libéré de la corruption  est une promesse future et certaine qui sera appliquée lors du retour de Christ pour tous ceux qui auront placé leur foi en Christ.

Puis en 2 Corinthiens 5 :

Aussi nous gémissons dans cette tente, désireux de revêtir notre domicile céleste par-dessus l’autre, si du moins nous sommes trouvés vêtus et non pas nus. Car tandis que nous sommes dans cette tente, nous gémissons, accablés, parce que nous voulons, non pas nous dévêtir, mais nous revêtir, afin que ce qui est mortel soit absorbé par la vie. Et celui qui nous a formés pour cela, c’est Dieu, qui nous a donné les arrhes de l’Esprit. (2 Cor 5 :3-5)

 

Nous voyons la cohérence Paulinienne quant à l’état de notre corps avant la résurrection de celui-ci. Comment dans le texte précèdent, Paul parle de l’expérience actuelle du chrétien. Il souligne notre gémissement pour revêtir un corps libéré de sa faiblesse, cette faiblesse qui fait du corps humain un corps mortel. Ainsi, l’expérience normale du chrétien qui a été racheté et qui a reçu  les arrhes du Saint-Esprit  n’est pas une vie totalement libérée de la maladie, mais une vie remplie d’espérance quant à ce  domicile céleste  que nous revêtirons lorsque Christ reviendra. C’est là que ce qui est mortel sera absorbé par la vie.

J’estime qu’il n’y a pas de commune mesure entre les souffrances du temps présent et la gloire à venir qui sera révélée pour nous. Aussi la création attend-elle avec un ardent désir la révélation des fils de Dieu. Car la création a été soumise à la vanité — non de son gré, mais à cause de celui qui l’y a soumise — avec une espérance : cette même création sera libérée de la servitude de la corruption, pour avoir part à la liberté glorieuse des enfants de Dieu. Or, nous savons que, jusqu’à ce jour, la création tout entière soupire et souffre les douleurs de l’enfantement. Bien plus : nous aussi, qui avons les prémices de l’Esprit, nous aussi nous soupirons en nous-mêmes, en attendant l’adoption, la rédemption de notre corps. Car c’est en espérance que nous avons été sauvés. Or, l’espérance qu’on voit n’est plus espérance : ce qu’on voit, peut-on l’espérer encore ? Mais si nous espérons ce que nous ne voyons pas, nous l’attendons avec persévérance.  (Rom 8 :18-25)

 

Ce verset confirme ce que nous avons pu déjà voir dans les deux précédents, à savoir que la création entière est soumise à la  futilité , c’est-à-dire qu’elle  est incapable de remplir son objectif créationnel , et cela depuis que Dieu maudit le sol terrestre lors de la chute.

Cette futilité se manifeste dans la servitude à la corruption, c’est-à-dire le déclin, la corruption physique et finalement la mort qui a imprégné le monde naturel. Ce gémissement présent dans la nature, qui attend d’avoir part à la liberté glorieuse des enfants de Dieu, est aussi présent dans le cœur des croyants qui attendent leur adoption eschatologique. Car elle implique la rédemption du corps, c’est-à-dire, la réception de la vie dans notre corps mortel (cf Rom 8 :11) de telle sorte qu’il soit ressuscité de la mort et qu’il ne soit plus un corps corruptible, mais un corps incorruptible et immortel (1 Cor 15 :42-44, 53-54).

C’est là que nous pourrons alors dire :  O mort, où est ta victoire? O mort, où est ton aiguillon?  ; Car la mort aura été engloutie dans la victoire.

La Bible souligne ainsi que la victoire de Christ dans sa mort et sa résurrection possède deux temps eschatologiques dans son expression (un salut qui est “déjà” là et une consommation de celui qui n’est “pas encore là”)  :

Le monde (…) consiste dans le ciel et la terre ; l’homme consiste en une âme et un corps ; et le royaume de Dieu, par conséquent, possède une dimension spirituelle cachée et une facette externe visible. Tandis que Jésus est venu une première fois pour établir le royaume dans un sens spirituel, il reviendra à la fin de l’Histoire pour donner une forme visible à celui-ci. La réformation procède de l’intérieur vers l’extérieur. (H. Bavinck, The last things, Baker, p.158)

 

Nous terminerons la prochaine fois cette réflexion sur le cadre herméneutique lié à la guérison physique en nous intéressant à la notion de Royaume de Dieu , car cette expression est fortement utilisée, voire abusée, dans les milieux qui exigent la guérison physique comme une marque du royaume pour maintenant.

 

DS

Voici les liens vers les articles de cette série  :

Partie I : Péché, maladie et souveraineté de Dieu

Partie II : La maladie et victoire dans l’oeuvre expiatoire du Christ

Partie III : La maladie et la tension du déjà / pas encore 

Réflexions conclusives

 

 

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